Edoh Kossi Amenounvé, DG de la BRVM d’Abidjan : « Il est important et urgent de concrétiser cette Verticale AME  » promue par l’IPEMED

Mercredi 23 Octobre 2019

Le fait que l’Europe, la Méditerranée et l’Afrique soient vouées à partager un destin commun relève aujourd'hui d’un consensus largement partagé. Reste la question opérationnelle : comment faire pour avancer en ce sens, co-construire ensemble cet avenir commun ? Tandis que l’Ipemed a créé et promeut la Fondation “La Verticale Afrique-Méditerranée-Europe” (AME), Edoh Kossi Amenounvé, directeur général de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM) ouest africaine d’Abidjan, questionne la réalité de la volonté des gouvernants  européens à nouer des rapports durables entre les deux continents. Il appelle pourtant de ses voeux le choix d’une intégration économique Europe-Afrique, qu’il juge urgente. Récit d’une rencontre.

 

Un article de Lina Kortobi 

 

Dans le cadre d’une rencontre matinale co-organisée par le CAPP (Club Afrique de la Presse Parisienne), le magazine African Business, et l’IPEMED, Jean-Louis Guigou, président de l’Institut, livre d’emblée le ton de la rencontre : « À l’Ipemed, nous sommes fortement impliqués pour porter le plaidoyer de la construction d’une grande région entre les deux continents, à laquelle nous avons déjà consacré plusieurs travaux, et pour laquelle nous avons créé une fondation ad hoc, que nous appelons La Verticale AME, pour Afrique-Méditerranée-Europe, et dont l’objectif est de promouvoir l’intégration économique dans la zone. Ma question est simple, poursuit Jean-Louis Guigou à l’adresse d’Edoh Kossi Amenouvé  : comment la bourse régionale d’Afrique de l’Ouest pourrait-elle contribuer à ce travail de co-construction Afrique-Europe ? » 


Edoh Kossi Amenounvé, qui dirige depuis 2012 la BRVM, seule bourse régionale à faire coopérer huit pays d’Afrique de l’Ouest – Bénin, Burkina Faso, Guinée-Bissau, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, Togo –  met pour sa part l’accent sur une « mobilisation des ressources locales pour le financement des États et des entreprises sur le continent », regrettant aussitôt la trop faible implication des entreprises européennes – et particulièrement françaises – dans la détention d’actifs d’entreprises africaines, notamment en comparaison à leurs homologues américains. « Comment se fait-il que les Américains ont une meilleure perception du risque sur les actifs africains, alors même que leur monnaie n’est pas arrimée à l’euro, et qu’ils détiennent moins de filiales sur place ? », s’interroge-t-il. « J’ai tenté pendant des années de me rapprocher des investisseurs institutionnels français et européens pour leur expliquer que la détention d’actifs financiers en Afrique fait normalement partie de nos axes de développement… mais ça n’a jamais véritablement fonctionné ! »   

Aujourd’hui, il n’est plus question d’une relation au seul profit du Nord et  au détriment du Sud, mais d’un partenariat gagnant-gagnant, déclarent de conserve Jean-Louis Guigou et le DG de la BRVM. Ainsi, selon Edoh Kossi Amenounvé, « si l’idée d’une intégration Nord-Sud promue par l’Ipemed est soutenue sur le plan politique, cela peut changer fondamentalement les relations entre l’Europe et l’Afrique. Il est donc important et urgent de concrétiser cette Verticale AME. Mais il faut aussi que les acteurs européens comprennent qu’entretenir des fortes relations de long terme avec notre continent favorisera leur développement futur ». 

Cette coopération passera donc nécessairement par de « vrais engagements pour nouer des relations durables » et par l’encouragement d’actions de proximité – de co-construction – entre acteurs économiques européens et africains menées sur le terrain, ont considéré ensemble Jean-Louis Guigou et  Edoh Kossi Amenounvé.

Parallèlement, une intégration  financière est souhaitable partout sur le continent, souligne Edoh Kossi Amenounvé. Ce serait penser les relations infra-aricaines « autrement que sous l’angle strictement commercial ». « Si un Togolais vend à un Nigérien, comment effectuer un transfert d’argent rapide ?  », illustre-t-il. « Les commerçants ne peuvent plus s’accommoder de  l’informel. Un circuit bancaire non traçable représente un frein au développement des capitaux ». Mais cela n’implique pas pour autant « de déployer son énergie à formaliser l’activité de millions d’entreprises : nous devons tenir compte d’une réalité sociale, politique, culturelle. Demander à un cordonnier de formaliser son activité n’est sans doute pas pertinent. Commençons par nous concentrer sur ces 500 PME de la zone UEMOA, déjà bien structurées », a conclu Edoh Kossi Amenounvé.

 

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