Conférence - « Investir en Tunisie : nouveau contexte… nouvelles opportunités »

Mardi 12 Mars 2013
C’est un message fort de confiance en l’avenir qu’ont voulu adresser les représentants tunisiens aux investisseurs européens, mardi 5 mars à l’Assemblée nationale. Une confiance nourrie par une critique objective de la situation économique tunisienne, mettant en lumière ses forces comme ses faiblesses.

Organisé par Global Links et Conect – la confédération patronale de Tarak Chérif – en  partenariat avec IPEMED, la Conférence d’affaires intitulée « Investir en Tunisie : nouveau contexte… nouvelles opportunités » a réuni les représentants des grands bailleurs de fonds internationaux – Banque Mondiale, FMI, BAD, OCDE, BEI – autour du Gouverneur de la Banque centrale de Tunisie et du Président de l’Assemblée constituante.

La Ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq a souligné en ouverture les bons résultats de l’économie tunisienne – 3,6% de croissance en 2012 – et ce malgré les violents bouleversements politiques que connaît le pays depuis 2011. Ces résultats témoignent de la profonde résilience de l’économie tunisienne et des opportunités d’investissements qui existent aujourd’hui en Tunisie. Cette résilience, explique le Gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, tient à la croissance dans les services marchands : TIC, services aux entreprises et tourisme, le secteur touristique ayant déjà amorcé une reprise. La Ministre a réaffirmé son ambition de soutenir les projets de co-localisations entre l’Europe et la Tunisie, synonymes de création d’emplois durables. Pour le Président de l’Assemblée constituante tunisienne, ce concept de co-localisation est fondamental et doit être développé dans  le cadre du rééquilibrage des relations économiques Nord-Sud vers davantage de co-développement. La Ministre a ainsi identifié plusieurs pistes de partenariat et d’investissements, notamment dans les secteurs des transports ferrés, de la logistique portuaire et de la législation en matière de Partenariat Public-Privé.

Ce discours incitatif a été relayé par les représentants tunisiens, le Président de l’Assemblée constituante, Mustapha Ben Jafaar, et le Gouverneur de la Banque centrale, Chedly Ayari, qui ont voulu dresser un état des lieux en toute franchise de la situation politique et économique de la Tunisie.

Rappelant la ferveur démocratique dont les Tunisiens ont fait preuve depuis le 14 janvier, le Président s’est voulu rassurant sur l’avenir du pays dans les mois qui viennent : la Constitution pourrait être adoptée en première lecture fin mai et les différents groupes parlementaires se sont accordés sur un calendrier qui fixe les prochaines élections aux mois d’octobre ou novembre 2013. La nouvelle Constitution ne pourra être que fidèle aux valeurs de tolérance et de modération de la Tunisie, elle qui a toujours été étrangère aux extrémismes et à la violence. La régionalisation, la démocratie participative, la création d’une Cour constitutionnelle devraient ainsi y être inscrites.
 
Des vulnérabilités mais une situation économique globalement encourageante

Chedly Ayari a présenté en détail les résultats de l’économie tunisienne pour en faire une analyse sans concession. Malgré un potentiel de croissance important – entre 5% et 7% jusqu’en 2017 selon la Banque Mondiale – et un taux d’endettement soutenable – inférieur à 50% du PIB -, la Tunisie doit se soumettre à une discipline budgétaire, encourager la diversification de ses exports, créer les conditions de l’accroissement de l’épargne. Sur la question de la dégradation de la note souveraine, Chadly Ayari a insisté sur le strict respect par la Tunisie de ses engagements financiers, qui n’a jamais été en situation de défaut de paiement. Les conditions existent pour faire de la Tunisie un hub régional dans les services marchands, TIC et services aux industries en particulier. La participation des grandes banques françaises dans les banques tunisiennes en est un témoin. Pour cela, les investissements directs étrangers – 1,5 milliards d’euros en 2012 -  doivent être un véhicule du transfert de technologie et non un facteur d’endettement. Pour le représentant de la BAD, la Tunisie dispose en effet de véritables atouts pour capter une part importante des IDE en Afrique du Nord, sur la base d’une stabilisation rapide de la transition politique. La dynamique des IDE doivent être redéfinis non seulement vers davantage de transferts technologiques, mais également être plus inclusifs, adaptés au tissu économique local et associés à des outils de formation professionnelle.

Pour le représentant du FMI, les vulnérabilités persistent – inflation, déficit mal constitué – et les performances du secteur privé restent dépendantes d’une amélioration consistante de la situation politique. Parmi ses recommandations, le FMI a insisté sur la nécessaire valorisation de l’importante main d’œuvre diplômée dans le cadre d’activités productives à plus forte valeur ajoutée.
 
Pour améliorer le climat des affaires, la Tunisie doit entreprendre des réformes

Sur la base de ces états des lieux, les débats ont porté sur les réformes structurelles à entreprendre, notamment dans le cadre d’un nouveau code des investissements. Ce code devrait réaffirmer l’adhésion aux principes internationaux, rééquilibrer les incitations pour les statuts on-shore et off-shore, réviser les restrictions sectorielles et non sectorielles, réviser les procédures d’approbation. Ces réformes sont nécessaires pour que puisse émerger un climat des affaires favorable aux investissements. Pour la BAD, ce climat dépend de la capacité de la Tunisie à produire un code des investissements simplifié et une juridiction de contrôle.

Signal fort du volontarisme des autorités, la Tunisie a adhéré en mai 2012 à l’initiative de l’OCDE en faveur de l’investissement en Afrique et ainsi accepté un certain nombre d’engagements : offrir le traitement national aux investisseurs étrangers, se soumettre aux procédures OCDE de règlement de contentieux, promouvoir la conduite responsable des entreprises, et autres.

L’ensemble des bailleurs internationaux s’accordent pour définir les priorités suivantes : une législation sur les PPP, notamment de moyens niveaux ; l’appui aux PME et à l’innovation ; la révision du code des investissements ; la réussite de la transition politique. En clôture, Bernardino Leon s’est fait le porte-parole de l’optimisme des représentants tunisiens et des bailleurs internationaux quant à la capacité de la Tunisie à devenir un modèle pour la région, le « Singapour de la Méditerranée ».


Compte rendu par Hélène Picart
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