IPEMED partenaire du SIA 2014 - Vers un label méditerranéen des produits de terroir ? Enjeux au Nord et au Sud et modalités à suivre

Lundi 03 Mars 2014
La mise en place d’un label méditerranéen pour identifier des produits issus de la région méditerranéenne apparaît comme une initiative porteuse de perspectives socio-économiques, de réactivation d’un patrimoine commun pour les sociétés méditerranéennes et créateur de valeurs multiples (économique, sociale et environnementale).

L’objectif de l’atelier sur les indications géographiques et l’idée d’évoluer vers un « label méditerranéen des produits de terroir », animé par Fréderic Dubessy, rédacteur en chef d’Econostrum.info, fut de présenter les intérêts d’une telle démarche pour les opérateurs du Nord et du Sud ; d’identifier les conditions, les freins et les leviers que pourraient apporter un label méditerranéen et d’échanger sur les possibilités et les expériences de labellisation dans les pays du bassin méditerranéen.

Après une introduction par le Professeur Yavuz Tekelioglu, directeur du réseau Yücita de recherche sur les produits de terroir et les Indications Géographiques de Turquie et une présentation par M. Rudelt et Mme Isikgece du projet du groupe Metro sur l’ail de Taşköprü, les échanges entre les intervenants et l’interaction avec la salle ont permis de dégager les points clés suivants :

Les avantages d’un outil de labellisation par l’origine géographique pour les produits du terroir méditerranéen

En 2010, l’Unesco a inscrit la « diète méditerranéenne » au patrimoine culturel immatériel mondial. Pourtant, le constat est établi que le modèle de consommation alimentaire méditerranéen disparaît progressivement sous la pression du modèle agro-alimentaire dominant. Une reconnaissance par un signe de qualité au niveau méditerranéen aurait pour objectif de permettre aux micro-appellations d’Indication Géographique de s’unir afin de consolider l'identité méditerranéenne des produits   alimentaires et de rendre l'offre commerciale plus lisible sur un marché fortement concurrentiel où des régions géographiquement très éloignées produisent des spécialités méditerranéennes telles que l’huile d’olive, les agrumes ou le vin.

Dans les PSEM, chaque pays entreprend des démarches particulières pour faire reconnaître ses produits du terroir. L’atelier a été l’occasion d’étudier plus précisément les expériences turque et marocaine qui ont élaboré un cadre législatif qui reconnaît et protège ces produits. En Turquie, le manque de volonté des pouvoir publics et l’absence d’un système de contrôle efficace sont toutefois les principaux freins en vue d’établir un système satisfaisant de protection des indications géographiques.

Le regain d’intérêt pour les produits du terroir s’illustre tout particulièrement par le nombre important (plus de mille en 2011) de labels ‘Indications Géographiques’ (IG) dans l’Union Européenne (UE), qui a doublé depuis dix ans. Plus de 80 % des produits alimentaires labellisés en Europe proviennent  des pays européens méditerranéens, preuve si besoin est du potentiel sur lequel pourrait s’appuyer un label méditerranéen. Néanmoins, les PSEM desireux de labelliser leurs produits par l’UE peuvent attendre jusqu’à quatre ans avant que le produit labellisé.

Scepticisme du Nord et dynamisme du Sud

Administrateur à la Direction Générale pour l’Agriculture et le Développement rural à la Commission européenne, Eugenio Fernandez-Garcia a précisé que l’Union européenne n’a pas pour priorité de modifier son régime juridique relatif aux IG, mais il a appelé à promouvoir des actions qui favorisent la reconnaissance de la qualité des produits alimentaires méditerranéens. Il estime que l’UE doit être « convaincue » de la nécessité d’une telle démarche avant d’évoluer sur cette question.
Christian Teulade, Président du syndicat des AOP Olive de Nîmes et Huile d'olive de Nîmes, a insisté sur le risque de voir le tableau des signes de qualité se complexifier davantage avec la création d’une labellisation propre aux produits méditerranéens.

Intervenant sur la question cruciale relative à l’institution qui serait la plus à même de créer et de promouvoir cet outil de labellisation, Remo Ciucciomei, directeur général de l’Institut méditerranéen de certification, a indiqué sa préférence pour la constitution d’un réseau méditerranéen ou d’une plateforme de labellisation, en insistant sur la nécessité de connecter les réseaux publics et privés, plutôt que sur la création d’une marque ombrelle régionale. Une autre alternative serait de confier à un organisme issu de la société civile rassemblant des exploitations agricoles et des entreprises du terroir le soin d’élaborer des produits à indication géographique.

En lieu et place des opérateurs privés, un dispositif institutionnel public pourrait être à même de porter cet outil de labellisation. Membre de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), Christian Teulade est revenu sur l’historique et les avantages d’un tel système, centralisé et propre à la tradition française.

Circuits de distribution et commercialisation : deux facteurs à améliorer pour assurer une large diffusion des produits du terroir ?

Le témoignage de Jezia Lahmar Rachid, responsable d’une entreprise de transformation et de conditionnement de dattes traditionnelles en Tunisie, a permis de comprendre l’importance de favoriser des circuits de commercialisation de proximité et des filières courtes de valorisation de produits de terroir. Répondre au cahier des charges et obtenir une labellisation méditerranéenne permettraient de donner à ces produits un accès au marché local et à l’exportation.

Original à plusieurs égards, le projet présenté par le groupe Metro sur l’ail de Taşköprü en Turquie permet de donner aux agriculteurs d’une région turque isolée et peu développée un accès au réseau de la grande distribution. En parallèle, des actions de soutien aux agriculteurs (formation, structuration, organisation, etc.) sont menées afin d’inscrire ces initiatives dans la durée. Au sein de marchés agroalimentaires très concurrentiels, les petites entreprises de produits de terroir doivent s’appuyer sur des stratégies visant à valoriser la qualité des produits, la signalisation et la communication pour mieux se distinguer.  Un label méditerranéen permettrait de protéger les produits traditionnels de la Méditerranée et de les différencier en s’appuyant à la fois sur une approche « terroir » et sur la dynamique touristique autour du patrimoine culinaire méditerranéen.

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