MEDCOP Climat : retour sur l’Atelier 5 sur la sécurité alimentaire

Jeudi 28 Juillet 2016
Kelly ROBIN

Impliqués dans l’organisation du premier Forum Méditerranéen sur le Climat, les 4 et 5 juin 2015, à Marseille, RESOLIS, la Chaire Unesco en Alimentations du Monde, l’IPEMED et l’ARF ont souhaité porter, avec leurs partenaires du Sud et de l’Est de la Méditerranée, la Solution n°16, inscrite dans l’Agenda des Solutions Méditerranéen issu de la MEDCOP21. Cette Solution prévoyait la constitution d’une base de connaissances sur les systèmes alimentaires territorialisés en Méditerranée.

L’atelier 5, organisé dans le cadre de la MEDCOP Climat, qui s’est déroulée à Tanger, les 18 et 19 juillet 2016, a donc permis :

  • de présenter l’ouvrage intitulé « Systèmes alimentaires territorialisés en Méditerranée - Initiatives pour une alimentation responsable et durable » qui contient des contributions d’experts d’Espagne, de France, d’Italie, du Maroc, de Tunisie et de Turquie ;
  • de réaffirmer notre engagement en faveur d’une transition vers des modèles agricoles et alimentaires plus soutenables, en collaboration avec la Fondation Assemblée des Citoyens et Citoyennes de la Méditerranée qui a porté une Déclaration en ce sens ;
  • de présenter des cas concrets et recommandations pour améliorer la résilience des populations rurales, des systèmes agricoles et alimentaires face à des crises d’ordre environnemental, mais aussi économique, social, et politique ;
  • de décliner notre projet initial en une « Solution » qui figurera dans l’Agenda des Solutions méditerranéen de cette année, à savoir la création d’une plateforme collaborative sur les Initiatives d’Alimentation Responsable et Durable (IARD) en Méditerranée, qui pourrait donner naissance, une fois l’existant recensé et les axes de convergence identifiés, à la création d’un label « Terroirs de la Méditerranée » afin de promouvoir les produits du terroir, et ainsi contribuer à la valorisation de la diète méditerranéenne.

Résumé détaillé :

De la mise en évidence d’IARD à la nécessité d’améliorer la « gouvernance » agricole en Méditerranée

Organisé le 18 juillet, cet Atelier a permis surtout, au travers des différentes contributions et des échanges avec le public, de réaffirmer le rôle du local, comme moteur d’un redéploiement de la diète méditerranéenne en Méditerranéenne ; le foisonnement d’IARD dans la région témoignant des atouts de « systèmes alimentaires territorialisés » et de la nécessité de concilier adaptation et mitigation pour une intensification durable des systèmes agricoles méditerranéens. A la suite des propos tenus par Dr Mrabet Rachid, Directeur de Recherche à l’INRA Maroc, Membre Comité Scientifique COP22 et Membre du GIEC en faveur de « l’agriculture de conservation »,  Jean-Louis RASTOIN, Professeur émérite à Montpellier SupAgro, Conseiller scientifique de la Chaire Unesco AdM et expert associé à l’IPEMED, a présenté les trois conditions nécessaires à l’émergence d’un « ensemble de filières agroalimentaires répondant aux critères de développement durable, localisé dans un espace géographique de dimension régionale et coordonnées par une gouvernance territoriale » : un « sursaut » de la part du consommateur, une implication en masse des producteurs et un engagement des institutionnels en faveur de politiques alimentaires territoriales coordonnées au plan national et international.

Ces trois conditions ont été illustrées par les interventions :

- d’Irène Carpentier, doctorante-chercheuse à l’IRMC de Tunis, sous la direction d'Alia Gana, qui à partir de son travail de terrain sur la valorisation des produits traditionnels à Gabès (dattes, grenades, etc.), a insisté sur le paradoxe de produits territorialisés « déterritorialisés » car destinés à l’exportation, modèle d’exploitation peu soutenable à terme sans l’émergence d’une demande locale ;

 - d’El Houssein Erraoui, de l’Université d’Agadir, qui, dans la lignée de la présentation d’Irène, a appuyé la relance nécessaire d’un modèle de consommation autour des produits du terroir - action entreprise par le Maroc, dans le cadre du IIème Pilier du Plan Maroc Vert - avant de présenter les atouts et contraintes des SAT au Maroc ;

- de Selma TOZANLI du CIHEAM-IAMM, qui a fait part de l’expérience de la Turquie en matière de certifications d’indication géographique même si la faiblesse des mécanismes de contrôle publics et privés conduit à l’imitation et la falsification de nombre de ces produits de terroir certifiés IG, avec un effet néfaste tant sur les consommateurs que sur les producteurs locaux ;

- de Benoît FAUCHEUX, Président de la Commission Développement Durable de l’ARF, qui a appelé à prendre davantage en considération la nécessaire sensibilisation des citoyens aux bienfaits de la diète méditerranéenne et le rôle essentiel des régions pour initier et/ou accompagner le développement des SAT.

Ces cas concrets et les débats qui ont rythmé la deuxième partie de l’Atelier, modérée par Alia Gana de l’IRMC, ont alors mis en évidence la nécessité d’approfondir la gouvernance et la structuration des filières agroalimentaires, et de développer une approche intégrée et « bottom-up » des perspectives du secteur en Méditerranée.

Vers l’émergence d’une « Solution » : pour une plateforme collaborative sur les Initiatives d’Alimentation Responsable et Durable (IARD) en Méditerranée

Plébiscitée par les participants à l’Atelier, la « Solution » en faveur de la mise en place d’une plateforme collaborative sur les Initiatives d’Alimentation Responsable et Durable (IARD) en Méditerranée s’inscrit dans la continuité du Programme de recherche / action ISARD, piloté par la Chaire Unesco en Alimentations du Monde, Montpellier SupAgro, et du Programme Alimentation Responsable et Durable de RESOLIS et en particulier les enquêtes « IARD » menées par RESOLIS, en partenariat avec des acteurs locaux. Lors de la MEDCOP Climat, il a été proposé au public de s’approprier le concept des « SAT » en se positionnant pour mener et/ou accompagner le recensement d’échantillons de 100 « IARD » dans leur pays d’origine. Compte-tenu des défis communs auxquels font face les pays méditerranéens, l’identification d’IARD à l’échelle nationale et locale serait une première étape avant la construction d’une plateforme collaborative propre à la région et in fine, avant l’identification de mécanismes de coopération macro-régionaux pertinents ; l’objectif étant que la Méditerranée bénéficie aussi des résultats obtenus dans d’autres parties du monde. Dans cette perspective, la mise en place d’un label « Terroirs de la Méditerranée », prônée par l’IPEMED dès 2010, serait d’autant plus aisé à initier une fois cet effort de recensement, de sensibilisation et de coopération accompli.

Pourquoi cette Solution et comment y participer ?

Cette solution repose sur une valorisation et une mise en perspective des initiatives d’alimentation durable et responsable originales menées, mais aussi des acteurs de la chaîne agroalimentaire, qui initient ces projets qu’ils soient issus de la production, de la transformation, de la distribution ou de la consommation. Les méthodes retenues pour la réalisation du projet reposent sur l’idée que des acteurs locaux peuvent ouvrir des voies pionnières et tracer des perspectives pour la transition alimentaire et écologique (de la graine au compost). L’analyse de ces initiatives porte principalement sur leurs caractères innovants, ceux-ci se traduisent soit dans l’organisation de ces actions, qui souvent sont partenariales, soit dans leurs manières originales de réduire les externalités négatives ou de promouvoir des externalités positives, sociales, environnementales, pédagogiques et culturelles.

Concrètement, cette solution s’articulerait sous la forme d’une plateforme web en libre accès, permettant, grâce à un compte personnel, de recenser sous la forme de fiche-actions de deux pages une initiative d’alimentation responsable et durable (contenant notamment un point de contact de la structure recensée, les objectifs, actions mises en œuvre et retours d’expériences). Chaque fiche-action sera consolidée par un entretien avec le/les porteur(s) de projet, et pourra être accompagnée de documents annexes (non confidentiels uniquement). Le projet devra être en cours ou réalisé, le caractère original et/ou multi partenarial sera déterminant, et les initiatives à fort potentiel de développement ou d’essaimage pourront bénéficier de coups de projecteur.

Pour réaliser ces fiches-actions, RESOLIS mettra en libre accès aux personnes qui détiendront un compte tous les outils nécessaires.

Les fiches rédigées seraient ensuite soumises à un responsable de la plateforme en lien avec la responsable de programmes RESOLIS se chargera de les classer selon :

- le niveau de la chaine alimentaire,

- le type de projet,

- les externalités qu’elles produisent qu’elles soient au niveau social, environnemental, pédagogique, culturel (exemples pour chacun des niveaux : création ou maintien d’emploi, conservation de la biodiversité, informations ou sensibilisation tout public, maintien des patrimoines alimentaires),

- leur situation géographique.

Le responsable de la plateforme prendra le soin de faire valider aux porteurs de projet interrogés leur fiche-action. Les fiches seront ensuite transmises à un comité de lecture, lequel pourra leur attribuer des labels positifs ou négatifs et des « solutions », avant d’être publiées sur la plateforme. Les porteurs de projet recevront un mail automatique pour les informer de la mise en ligne de leur initiative, dont le contenu pourra à tout moment être modifié dans le futur.

Le développement de la plateforme permettrait de suggérer des initiatives semblables ou menées dans le même pays selon un ciblage des intérêts de celui ou celle détenant un compte et qui soumettra une ou des initiative(s). Les comptes personnels permettront également de mettre en favori les fiches souhaitées. Des documents informatifs liés aux politiques publiques en cours ainsi que des appels à projet ou à intérêt par exemple pourront également être mis à disposition dans un onglet spécifique (dont le contenu sera modéré par le responsable de la plateforme) ouvert à toutes les personnes détenant un compte personnel. Les acteurs impliqués pourront facilement entrer en contact les uns avec les autres et avec le responsable de la plateforme pour toute question ou pour soumettre une proposition.

La plateforme collaborative deviendrait ainsi un véritable outil opérationnel pour l’identification de mécanismes micro et macro-régionaux. Cette solution permettrait d’élargir les coopérations sur le plan Méditerranéen, et d’inciter les acteurs publics et privés à promouvoir et appuyer le développement des SAT.

Ainsi, si vous souhaitez vous engager dans l’aventure, vous pouvez contacter RESOLIS, rejoindre notre « consortium » et également signer la Déclaration portée par la Fondation Assemblée des Citoyens et Citoyennes de la Méditerranée.

Un grand merci à tous les participants de l’Atelier (au Professeur El Khanchoufi, au Dr Mouad Chentouf, au Professeur Kaid Youcel, à Leila Akhmisse, à Valérie Nicolas, à Touriya Atarhouch, à Annie Mellouki, à Denis Carel, à Morgane Iserte, etc.) et à nos interlocuteurs avant et pendant la MEDCOP Climat. Que notre collaboration sur ce beau sujet puisse continuer !                                                                                                                      

L’équipe organisatrice

 

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