1er Forum Méditerranéen de l’Eau . 19-20 décembre 2011. Marrakech

Mardi 20 Décembre 2011

Le 1er Forum Méditerranéen de l’Eau s’est tenu à Marrakech le 19-20 décembre 2011 avec la participation de 350 personnes. Près de quinze ans après le 1er Forum Mondial de l’Eau qui -lui aussi- avait vu le jour dans la même ville, les parties prenantes de l’eau du bassin méditerranéen se sont réunies pour la première fois ensemble à la veille d’une nouvelle édition du Forum Mondial de l’Eau.

La communauté méditerranéenne de l’eau s’est en effet fortement mobilisée pour être présente, depuis sa création, à chaque édition du forum mondial de l’eau afin d’obtenir sa reconnaissance régionale. Dans le découpage géographique du processus régional des précédentes éditions, la place de la Méditerranée n’était jamais acquise d’office.  Pourtant comme le soulignait la Présidente de l’Institut Méditerranéen de l’Eau (IME), Milagros Couchoud, dans son discours d’ouverture, « les problèmes de l’eau posées dans notre région (méditerranéenne), connue pour son contexte géo-climatique très spécifique, ont trouvé des solutions tout au long des siècles qui permettent à ce jour de donner à cette communauté la légitimité d’une grande maîtresse de la gestion de l’eau ». Les représentants de la communauté méditerranéenne de l’eau souhaitent contribuer aux débats régionaux et mondiaux pour faire avancer la cause de l’eau. Ainsi, dès le mois d’avril 2011, il avait été convenu lors d’une réunion à Murcie de lancer un processus méditerranéen qui aurait pour double-objectif, la préparation d’un processus intercontinental méditerranéen pour le 6ème Forum Mondial de l’Eau, et la mise en place effective d’un Forum Méditerranéen de l’Eau qui, au-delà de sa première tenue, devrait être établie de manière pérenne dans le but de porter la voix de la communauté méditerranéenne de l’eau.

A moins de 3 mois du prochain forum mondial de l’eau, le forum de Marrakech a été l’occasion de présenter d’une part l’avancée des travaux des groupes cibles du processus intercontinental méditerranéen et de recueillir les considérations des différents réseaux méditerranéens de l’eau pour envisager la pérennisation d’un Forum Méditerranéen de l’Eau. Plusieurs projets ont également été présentés en session parallèle après la clôture du forum.

1. Les objectifs cibles méditerranéennes

En accord avec les termes de référence définis par le Comité International du 6ème Forum Mondial de l’Eau (CIF), quatre thèmes prioritaires, réunissant chacun 2 cibles, ont été identifiées en cohérence avec les objectifs-cibles des processus thématiques et régionaux concernés.
(voir site officiel du 6ème Forum Mondial de l’eau http://www.worldwaterforum6.org/en/ )

Les priorités retenues pour le processus méditerranéen sont les suivantes :

- 1. l’amélioration de la gestion de la demande d’eau
- 2. le recours aux eaux non conventionnelles
- 3. l’amélioration de la gouvernance de l’eau
- 4. la collecte et le traitement des eaux usées urbaines et industrielles

(voir document joint pour le détail de chaque objectif-cible)

Dans certains pays de la rive sud de la Méditerranée (Jordanie, Israël, Egypte, Malte, Syrie), les prélèvements en eau approchent, voire dépassent, le niveau limite des ressources renouvelables. Les stratégies nationales de ces pays privilégient encore trop souvent l’accroissement de l’offre en eau, mobilisant et portant davantage atteinte aux ressources naturelles. Dans un contexte de pénurie croissante dans une partie de la région, il apparaît impératif de mettre en œuvre des politiques de gestion de la demande d’eau (gestion des différents usages, utilisation économe et optimale de l’eau, développer les technologies adaptées…) en tenant notamment compte des besoins importants en eau de certains secteurs, comme l’agriculture qui consomme dans certains pays plus de 80% des ressources.

S’agissant de l’utilisation des ressources en eau non conventionnelles (réutilisation d’eaux usées traitées, dessalement d’eau de mer…), c’est une pratique existant dans plusieurs pays du bassin méditerranéen mais dont le niveau de développement varie d’un pays à un autre. Il convient dès lors d’inciter les pays de la région à inclure le recours à ces nouvelles ressources dans la planification des ressources en eau et à définir un cadre réglementaire commun dans le bassin méditerranéen.  Plusieurs initiatives nécessiteraient également d’être lancées par les groupes industriels qui consomment de l’eau dans leur process industriel et qui pourraient recourir à l’usage d’eaux usées. Un représentant de l’Office Chérifien des Phosphates (OCP) a fait une présentation au sein de laquelle il a précisé que son groupe mobilisait de plus en plus cette nouvelle ressource.

En termes d’amélioration de la gouvernance de l’eau, il a été rappelé que beaucoup de pays méditerranéens souffrent encore du manque de capacités techniques et de planification, de l’absence de stratégies opérationnelles et de la fragmentation des responsabilités entre les autorités. Au cours du groupe de travail de la priorité, certains acteurs de la société civile ont souligné que les parties prenantes n’étaient pas suffisamment incluses dans le processus de décision. La gouvernance locale de l’eau doit passer par une plus grande concertation entre les acteurs de l’eau. Mais à quel niveau ? Le bassin hydrographique demeure l’échelle de référence avec la définition du Schéma Directeur d’Aménagement de Gestion des eaux (SDAGE) au sein du Comité de Bassin, et le Schéma d’Aménagement de Gestion des eaux (SAGE), déclinée à l’échelle plus locale dans les Commissions locales de l’eau. Si cette architecture ne s’observe pas dans tous les pays de la région, le Président du Conseil d’Administration de l’Agence Rhône-Méditerranée Corse fait remarquer que pour déterminer le bon niveau de concertation il faut se demander si ce niveau est opérationnel, si les gens réunis se sentent tous concernés et si toutes les parties concernées par la question de l’eau sont sollicitées.

Enfin, beaucoup reste encore à faire en matière de collecte et de traitement de rejet des eaux usées issues des zones urbaines et de l’activité industrielle. En effet, si des efforts ont été entrepris en matière d’assainissement urbain, des efforts supplémentaires doivent être effectués pour l’assainissement industriel. Les pays de la région doivent ainsi définir les modalités techniques et économiques selon lesquelles les rejets industriels pourront être rejetés dans les réseaux publics d’eaux usées. Néanmoins, cela doit passer par la mise en œuvre concomitante d’une stratégie de recouvrement durable des coûts des services d’assainissement en utilisant tous les leviers de ressources financières (tarification, taxes, transferts internationales). De telles démarches peuvent  conduire à la réorganisation des services de l’eau pour mieux les mettre en interface avec d’autres services indispensables : la gestion des services d’énergie. Ali Fassi Fihri, Directeur de l’ONEP, a évoqué le projet de fusion entre l’Office National de l’Eau Potable et l’Office National d’Electricité au Maroc qui va très prochainement se concrétiser, et qui pourra permettre la réalisation de péréquations.

Toutes les solutions pouvant répondre aux objectifs-cibles du processus méditerranéen seront incluses dans le rapport régional qui sera présenté lors du 6ème Forum Mondial de l’eau.

2. Pérenniser le Forum Méditerranéen de l’eau

Compte tenu des difficultés répétées tous les 3 ans à chaque forum mondial pour réunir les pays du bassin méditerranéen dans un processus trans-régional, l’idée a été suggérée par plusieurs acteurs de la région de lancer un forum méditerranéen de l’eau. Cette initiative est soutenue par les pays de la rive sud de la Méditerranée. Il a été rappelé par l’IME, à l’initiative de ce projet, que cette plateforme de la communauté méditerranéenne de l’eau, s’appuierait sur les principes suivants :

- le Forum méditerranéen de l’eau n’est pas une nouvelle structure
- le Forum est le porte parole de la communauté méditerranéenne de l’eau tant auprès des instances internationales que régionales
- le Forum est une plateforme de rassemblement où toutes les parties prenantes de la communauté méditerranéenne de l’eau sont représentées, abstraction faite de tout leadership géopolitique, géoconomique ou social
- le Forum devra débattre de toutes les questions pour faire avancer la problématique de l’eau dans la région.

Un comité ad hoc chargé de définir la feuille de route du forum devrait être ultérieurement nommé.

3. Side-Events : la présentation du projet d’PEMED

Plusieurs side-events ont été organisés après la séance de clôture du forum. On peut regretter que ces événements parallèles n’aient pas été mieux intégrés dans le programme du forum. Les projets proposés dans ces side-events ont porté sur l’harmonisation des systèmes nationaux d’information sur l’eau, le système d’aide à la décision Strateau pour la gestion territoriale de l’eau, ou encore le transfert d’eau.

IPEMED a également eu l’opportunité de présenter un projet de mise en valeur et de mutualisation des centres d’expertise de l’eau méditerranéens qui a été le fruit d’une réflexion menée avec plusieurs experts de la région au cours de l’année 2011.

Voir le document présenté en side-event ci dessous:

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