Le printemps de l'engagement solidaire - IPEMED, partenaire de la première édition de MedESS 2013, Tunis

Mardi 01 Janvier 2013
Amal Chevreau et Alexis Ghosn

IPEMED a été partenaire de la première édition de MedESS tenu à Tunis du 2 au 4 mai 2013, à l’initiative de la MACIF (membre fondateur d’Ipemed) et du Crédit Coopératif. Cette première édition de MedESS souhaite positionner l’Economie Sociale et Solidaire comme levier essentiel d’un développement responsable et créateur d’emplois dans le bassin méditerranéen. Plus de 300 acteurs de l’ESS ont pris part à cette édition fondatrice qui ambitionne de devenir le rendez-vous incontournable du secteur de l’ESS dans la région méditerranéenne et jette les bases d’un écosystème méditerranéen favorable aux entreprises sociales. Son objectif principal est de mettre en lumière les projets et pratiques de l’ESS, en encourageant l’inter-coopération des acteurs.

"Nous désirons lancer la construction d'un écosystème méditerranéen favorable au développement des acteurs de l'économie sociale et solidaire, faire tomber les barrières et décloisonner les mondes des institutions, des entreprises "classiques", des entreprises sociales et de la société civile, afin de favoriser des coopérations ambitieuses et opérantes". L'ambition des organisateurs du Medess se justifie par la nouvelle donne aussi bien au sud qu'au nord : crise au nord et révolutions et transitions au sud.

La première édition du MedESS 2013 a été marquée par la participation effective de Radhi Meddeb et de Jean-Louis Guigou, respectivement Président et Délégué général d’Ipemed, ainsi que d’Amal Chevreau, responsable du pôle études et projets. 

Le programme de cette première édition de MedESS 2013 s’est articulé autour de 3 conférences plénières, de 5 ateliers thématiques et de 4 sessions d’échanges de bonnes pratiques. Les conférences plénières ont porté sur:

  • les nouveaux enjeux économiques et sociaux auxquels font face les hommes et femmes de la Méditerranée 
  • les réalités de l’ESS en Méditerranée 
  • l’après MedESS 2013. 

Les 5 ateliers thématiques ont porté sur les thèmes centraux de l’ESS à savoir:

  • produire durablement pour tous
  • consommer et créer de l’emploi de qualité
  • travailler et créer de l’emploi de qualité
  • garantir l’accès aux soins
  • donner l’accès à des produits et services financiers

Enfin les sessions de bonnes pratiques ont permis d’échanger sur :

  • la création d’entreprise sociale et solidaire
  • la formation des jeunes et de acteurs
  • les valeurs de l’ESS
  • le financement de projets

Radhi Meddeb a pris à la session plénière qui lancé les travaux de MedESS 2013 le 2 mai 2013 et qui avait pour thème principal « les hommes et les femmes de la Méditerranée face aux nouveaux enjeux économiques et sociaux. Lors de son intervention, Radhi Meddeb a rappelé que la création d’emploi est le premier défi des Psem qui doivent à la fois réussir la transition politique et le décollage économique. Il a salué l’initiative des organisateurs de MedESS 2013 d’ouvrir les débats en donnant la parole à deux jeunes bénévoles notamment à Selma qui a rappelé que «le travail reste un mirage en Tunisie. Ce constat n'est pas que tunisien, mais méditerranéen. Les vrais problèmes ne sont ni religieux, ni politiques, mais socio-économiques !". Il a précisé que ce constat est conforme aux besoins en matière de création d’emplois dans la région en rappelant que les Psem doivent créer 50 millions d’emplois d’ici à 2030. Il a insisté sur le fait que l’ESS n’est pas la solution miracle mais fait partie des secteurs qui peuvent contribuer à enrayer le chômage endémique des jeunes et des femmes dans les Psem.

Le secteur de l’ESS est porteur car il permet la participation et l’expression de la société civile et préconise une autre façon de faire de l’économie en remettant au centre des préoccupations l’humain. C’est une des exigences exprimées par les populations depuis les soulèvements arabes. Toutefois, il a également souligné que « si l'économie sociale et solidaire représente près de 10% de l'emploi en moyenne en Europe, elle n'atteint pas les 1% au Maghreb. "Nous sommes loin du potentiel. Les populations peuvent se prendre en charge, s'approprier un problème pour satisfaire leurs besoins. Mais cela suppose un cadre légal de fonctionnement".

Selon le réseau ESMED qui regroupe les structures de l’ESS d’Espagne, de France, de Grèce, d’Italie, du Portugal, de l’Algérie, de la Tunisie, du Maroc, de l’Egypte et de la Turquie, le secteur de l’ESS en Méditerranée est composé par 410.000 structures sous différentes formes regroupant 134 millions de membres avec un chiffre d’affaires estimé à 558 millions d’euros représentant 6.2 millions d’emplois.

Intervenant aux travaux de la seconde séance plénière du 3 mai 2013 portant sur les réalités de l’ESS en Méditerranée Amal Chevreau a apporté un éclairage sur la situation au Maghreb. Elle a souligné qu’Ipemed travaille sur la réalisation d’une étude portant sur l’état des lieux de l’ESS dans les trois pays du Maghreb : Algérie, Maroc, Tunisie. Les premiers éléments de cette étude révèlent qu’en Tunisie, le développement de l'ESS a été important entre 2010 et 2012, passant de 9 500 à 14 000 associations. Mais la répartition spatiale des associations demeure inégalitaire sur le territoire. "Un décalage se fait jour entre les formes traditionnelles de solidarité et d'entraide et le souhait des jeunes de créer un entreprenariat social". En Algérie coexistent forme traditionnelle et solidarité institutionnalisée. Néanmoins, l’État a créé une agence de développement social pour aider à l'essor de l'ESS.

Au Maroc, le développement de l'ESS a été constaté suite aux plans d'ajustement structurel initiés dans les années 80. Depuis l'émergence en 2005 de l'initiative nationale pour le développement humain qui reconnaissait l'ESS, une réelle impulsion est constatée. "Une coopérative se crée par jour au Maroc" indique Touhami Abdelkhalek, professeur à l'Institut national de statistique et d'économie appliquée du Maroc.

De manière générale Amal Chevreau constate qu’« à ce jour, dans les trois pays du Maghreb, l'ESS reste une économie caractérisée par l'approche statutaire. Nous ne sommes pas encore dans une économie sociale par la finalité». Une multiplicité d'intervenants émerge dans le contrôle et le suivi de l'ESS soulignant un manque de coordination. Au Maroc, une enquête a montré un problème de ciblage de l’activité des entreprises sociales dans le but de s’ajuster à l’économie.

Même si des outils se créent comme le réseau maghrébin de l'économie sociale et solidaire (Maghreb-ESS) constitué par la société civile en mars 2013, les principaux freins du développement reposent sur les problèmes de commercialisation des produits, l’accès difficile aux moyens financiers, les blocages juridiques et le manque de moyens humains malgré le chômage des jeunes.

L’ensemble de ces éléments rendent difficile l’appréciation de l’impact des entreprises sociales et du secteur en général dans l’économie des pays de la région car des structures œuvrant dans le secteur peuvent être créées sans être nécessairement actives.

En conclusion Gérard Andreck, président du groupe Macif, et Jean-Louis Bancel, président du groupe Crédit Coopératif ont souligné que "L'ESS peut et doit démontrer, par l'exemple, toute la force de son modèle de développement socio-économique. L'ESS créé de l'activité durable sur les territoires, stimule la participation citoyenne, ne spécule pas, respecte l'environnement. Elle offre à chacune et à chacun l'opportunité de bâtir son propre destin en libre coopération avec les autres".


Amal Chevreau et Alexis Ghosn

Partagez cet article
Imprimer Envoyer par mail