La Tunisie, un modèle en matière d’efficacité énergétique en Méditerranée ?

Mardi 13 Octobre 2015
Kelly ROBIN, Ahmed HERZI
Compte-rendu de l’Atelier IPEMED  - ADEME sur l’efficacité énergétique en Méditerranée organisé lors de World Efficiency

Dans le cadre de la première édition de World Efficiency, qui s’est déroulé du 13 au 15 octobre, au Parc des expositions de Paris (Porte de Versailles), IPEMED, en partenariat avec l’ADEME, a organisé un atelier sur le thème : « Potentiel de la filière de l'efficacité énergétique comme levier de développement socio-économique durable dans les pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée ».

Conçu sur un mode interactif, cet évènement a permis de présenter et d’illustrer, à partir de l’expérience tunisienne, les résultats de l’étude sur l’efficacité énergétique en Méditerranée, menée par IPEMED, dans le cadre de son partenariat avec l’ADEME, membre du réseau MEDENER.

Kelly ROBIN, Chef de projet Infrastructures et ressources naturelles au sein d’IPEMED, a ainsi rappelé les enjeux de l’efficacité énergétique en Méditerranée :
-    forte hausse de la demande en énergie dans les PSEM (+42% en 2000 et 2010) ;
-    pays importateurs d’énergie (en particulier Maroc et Liban) confrontés à la nécessité de sécuriser leurs approvisionnements ;
-    forte dépendance des PSEM aux énergies fossiles (le pétrole représentant en moyenne 48% de l’énergie consommée en 2012, dans les quatre pays concernés par l’étude – Maroc, Algérie, Tunisie, Liban) ;
-    secteurs des transports, du bâtiment et de l’industrie particulièrement énergivores et dont l’intensité énergétique augmente, etc.
La situation énergétique des PSEM est particulièrement précaire en raison du poids des subventions allouées à la consommation d’énergie, qui atteignent avant impôt, environ 11% du PIB en Algérie, 5% au Liban, 3% en Tunisie et moins d’1% au Maroc, d’après le Fonds Monétaire International.

La mise en œuvre de politiques proactives en matière d’efficacité énergétique est donc pleinement justifiée, mais implique la prise en compte des enjeux sociétaux qui y sont liés (cas de la réforme desdites subventions) et devrait être perçue comme un levier d’action pour un développement socio-économique durable des PSEM. A cet égard, la contribution climat de la Tunisie témoigne de l’émergence d’une approche intégrée des impacts liés à une meilleure maîtrise de l’énergie, puisqu’elle insiste sur les créations d’emplois induites : « environ 58.000 équivalent-emplois sur la période 2015-2030, dont 75% proviendraient des mesures d’efficacité énergétique ».

De plus, la Tunisie est, à certains égards, un modèle en Méditerranée puisque le pays rassemble plusieurs conditions nécessaires à la mise en place d’une filière d’efficacité énergétique : existence d’un cadre institutionnel national clair, complet, cohérent et incitatif, mise en œuvre et suivi par une agence nationale dédiée et des instances de concertation, définition d’objectifs chiffrés et précisés par secteur, déclinaison de la stratégie au niveau régional et local, mise en place de projets-pilotes, accent mis sur la sensibilisation et la formation, etc. Tel qu’exposé dans 30/30 - La Stratégie nationale de maîtrise de l’énergie – Objectifs, moyens et enjeux (juin 2014), l’Agence Nationale de Maîtrise de l’Energie tunisienne (ANME) concentre ses efforts sur l’industrie, qui représenterait 51% des économies d’énergie réalisées sur la consommation énergétique nationale.

Cet objectif a amené l’IPEMED et l’ADEME à inviter le Centre International des Technologies de l'Environnement de Tunis (CITET) à nous faire part de son retour d’expérience dans l’amélioration de l’efficacité énergétique des entreprises. Etablissement public, placé sous la tutelle du Ministère tunisien de l’Environnement, et créé en 1996, le CITET, représenté par Ahmed HERZI, Sous directeur de l'assistance technique aux entreprises, concentre ses actions sur la formation, le transfert et l’adaptation des technologies environnementales aux besoins nationaux, l’assistance aux entreprises, les analyses environnementales, et la documentation et l’information dans les thématiques environnementales. En tant que centre national de production propre et partenaire principal de l’ONUDI, dans le cadre du Projet de Production Propre Tunisien (PPPT), le CITET a ainsi participé à la l’application et la diffusion du concept de production propre  auprès des entreprises tunisiennes, via la mise en place de systèmes de comptabilité / suivi énergétique et d’optimisation de l’exploitation des installations techniques. Ainsi, et à titre d’exemple, la mise en place d’un système de comptabilité énergétique dans 8 entreprises industrielles et hôtelières a nécessité un investissement cumulé de 0,7 million d’euros et a permis d’atteindre entre 5 à 10% d’économies, pour un retour sur investissement compris entre 2 et 5 ans.

Comme cela a été mis en avant par Kelly Robin, la mise en œuvre de ces options de production propre et la réplicabilité de cette démarche sont conditionnées par l’accès des entreprises à des sources de financements idoines – problématique prise en compte par le CITET qui a mis à disposition des entreprises tunisiennes un « Guide pratique des mécanismes de financement », où sont explicitées les conditions d’accès aux fonds nationaux pour le financement des projets de protection de l’environnement et d’économie de l’énergie et aux lignes de crédit mis en place par les bailleurs de fonds internationaux. De cette initiative se dégagent clairement les enjeux liés à l’information, la sensibilisation et la formation, préalables à la réussite de toute mesure d’efficacité énergétique et à la diffusion d’une « culture environnementale ». Le volet « formation » du CITET a, par exemple, permis à la fois de renforcer la prise de conscience des acteurs tunisiens sur l’environnement, mais aussi de démontrer que l’efficacité énergétique peut être une filière pourvoyeuse d’emplois (15 jeunes ingénieurs formés sur l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables ont été recrutés, par la suite).

Le CITET, qui se présente comme une « plateforme de coopération Nord-Sud, Nord-Sud-Sud et Sud-Sud », illustre l’intérêt, cher à IPEMED, d’un approfondissement de la coopération entre pays méditerranéens afin d’œuvrer, ensemble, à la nécessaire transition écologique de nos économies et de nos sociétés.   


Pour en savoir plus, vous pouvez contacter :

-    Ahmed HERZI :  [email protected]

, site web: www.citet.nat.tn
-    Kelly ROBIN : [email protected]



Partagez cet article
Imprimer Envoyer par mail