Pour une nouvelle forme de partenariat en Afrique : la logique de coproduction

Mercredi 13 Avril 2016
Laura Fabre

Alors que l’Afrique, la Méditerranée et l’Europe possèdent des atouts considérables et des complémentarités économiques évidentes, leur insuffisante coopération les affaiblit. Dès lors, la coproduction apparaît comme un moyen efficace pour renforcer l’intégration régionale et ainsi proposer un développement du continent africain qui soit à la fois durable et inclusif.

 

Malgré leur proximité géographique et culturelle, les relations économiques qu’entretiennent l’Union Européenne et les Pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée (PSEM) demeurent très limitées au regard de leurs complémentarités mutuelles. D’autre part, les pays d’Afrique subsaharienne échouent à mettre suffisamment en valeur leurs avantages comparatifs, et, ce faisant, ne s’inscrivent pas dans une coopération avec leurs voisins méditerranéens et européens leur permettant une montée en gamme de leur économie, notamment sur le plan industriel.

Pourtant, les dynamiques économiques actuellement à l’œuvre devraient inciter les pays de la grande région Afrique-Méditerranéen-Europe à mettre en place une coopération accrue : la baisse du prix du pétrole rend la diversification nécessaire pour certains PSEM, en particulier l’Algérie ; l’émergence de classes moyennes en Afrique offre des débouchés économiques conséquents ; l’Afrique peut faire valoir son réservoir de main d’œuvre qualifiée et hautement qualifiée face au vieillissement de la population européenne ; le positionnement géostratégique des PSEM aux confluences du marché africain et des besoins du Moyen-Orient en font des partenaires de choix.

Toutefois, l’émergence d’un tel partenariat est conditionnée à une variable majeure, à savoir le changement de paradigme envers le Sud : il est impératif de concevoir son voisin non plus comme un sous-traitant ou un client mais comme un véritable partenaire. D’autre part, la coopération Sud-Sud doit impérativement être renforcée. Certes la dynamique existe déjà – comme le prouvent la politique de « conquête » de l’Afrique engagée par Mohammed VI ou la signature en juillet 2015 de la Tripartite créant une zone de libre-échange qui s’étend du Cap au Caire – mais reste trop peu exploitée. Les PSEM sont en mesure de proposer aux pays d’Afrique subsaharienne un modèle de convergence davantage atteignable que celui proposé par les sociétés occidentales, au premier rang desquelles l'Europe.
Pour toutes ces raisons, la coproduction s’impose comme une dynamique mutuellement bénéfique.

Quatre piliers structurent l’initiative de coproduction : le partage de la valeur ajoutée, le transfert de technologies, les investissements durables et le partenariat. Placer cette logique au cœur d’un partenariat entre la Méditerranée et l’Afrique permettrait de proposer au continent africain un nouveau modèle de développement qui soit plus durable et inclusif.

Alors même que ce scénario est soumis à certaines conditions – la forte croissance que connaît le continent africain doit s’inscrire dans la durée ; la stabilité politique s’impose comme une nécessité vis-à-vis des potentiels investisseurs, de même que le développement des infrastructures et la réforme de la formation pour une meilleure adéquation avec le marché du travail – les expériences fructueuses de coproduction du Japon avec les Dragons puis les Tigres dans les années 1960-1980 et de l’Allemagne avec les Pays d’Europe Centrale et Orientale après la chute du Mur de Berlin donnent une perspective intéressante en ce qui concerne la région Afrique-Méditerranée-Europe. 

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