Parution du rapport d’’IPEMED sur la filière TIC euromaghrébine

Mardi 04 Novembre 2014
Macarena Nuño, chef de projet à IPEMED
En 2011, IPEMED a retenu le thème de « l’informatisation de la société méditerranéenne » comme un axe majeur de coopération dans la région. Une première étude Vers un espace .med. La confiance dans la société numérique méditerranéenne  a été réalisée par un groupe d’experts Nord - Sud. Cette étude a fait le constat suivant : le développement du numérique est trop important pour en laisser la conduite stratégique et la gouvernance au seul niveau national. Il nécessite une politique euro-méditerranéenne globale visant à créer un espace commun numérique, une société méditerranéenne de l’information et de la connaissance, pivot d'une véritable politique au service de la croissance économique.

Pour y parvenir, les auteurs ont identifié une série de recommandations, parmi lesquelles le développement d’une stratégie industrielle encourageant le développement des contenus (logiciels et programmes) et des services liés aux TIC et soutenant les jeunes ingénieurs au travers de startups et d’incubateurs. Cette piste d’action revêt un intérêt tout particulier car elle se trouve au cœur de la réflexion portée par l’IPEMED sur la coproduction.

C’est dans ce cadre, que l’étude « Les technologies de l’information au Maroc, en Algérie et en Tunisie: Vers une filière euromaghrébine des TIC ? », qui vient d’être publiée, a été réalisée, avec l’objectif de mieux appréhender la réalité du numérique dans les pays du Maghreb, de voir les potentialités et d’envisager la possibilité de mettre en place une filière euromaghrébine des TIC.


Extraits


Nul ne doute aujourd’hui des opportunités offertes par les TIC en termes de croissance , de création d’emploi (140 000 emplois en Algérie), d’amélioration des conditions de vie (meilleur accès à l’éducation, à la santé, etc.), comme levier d’inclusion sociale et financière (à travers par exemple le mobile money), comme moyen de rapprocher les citoyens de leur administration, etc.

Les pays du Maghreb ont, avec des différences selon les pays, les ingrédients minimum pour pouvoir profiter de cette troisième révolution industrielle qu’est le numérique. Ils disposent tous de stratégies nationales (Maroc numeric 2013, Tunisie digitale 2018, e-Algérie) avec des objectifs identifiés et des plans d’actions. Il leur revient maintenant, au-delà des annonces, de veiller à la bonne exécution de ces stratégies afin qu’elles atteignent les résultats escomptés.

Malgré l’existence de zones technologiques équipées (cyberparc de Sidi Abdellah, technopark de Casablanca et d’El Gazala, etc.) et d’infrastructures permettant un accès à la 3G, des disparités importantes demeurent notamment entre zones rurales et zones urbaines et zones d’intérieur et zones côtières qui empêchent d’exploiter toutes les potentialités de l’Internet. Les taux de pénétration d’Internet demeurent faibles (autour de 10% ) et le prix pour accéder à ces technologies encore cher pour envisager un accès pour tous. Des efforts doivent être consentis par les pouvoirs publics afin de démocratiser l’accès aux nouvelles technologies de l’information.

Les trois pays du Maghreb ont des systèmes d’enseignement qui forment des ingénieurs et des techniciens avec des compétences technologiques mais en nombre insuffisant par rapport aux besoins du marché. Les filières des sciences sociales et humaines continuent d’attirer la majorité des étudiants. Par ailleurs, une politique active à l’égard des jeunes entrepreneurs est essentielle si l’on veut encourager la production de contenus au niveau local et développer les activités à haute valeur ajoutée et ainsi éviter la fuite de ces cerveaux vers l’Union européenne ou les Etats-Unis, voire encourager le retour des professionnels du secteur partis ailleurs. Dans ce cadre, une mobilité accrue entre les pays du Maghreb et entre ceux-ci et l’Union européenne est également indispensable. L’industrie du numérique est intensive en capital humain disposant de compétences très spécialisées. Une plus grande mobilité de ces compétences accroît les échanges économiques, facilite les transferts de savoir-faire, l’amélioration des compétences et booste l’innovation.

Des fonds dédiés au soutien du secteur des TIC existent (Maroc numeric funds, Faro , fonds Tuninvest innovations , etc.). Ils gagneraient à être renforcés et complétés par un fonds euromaghrébin qui accompagnerait les entreprises innovantes et les startups mettant en place des coproductions et des activités à dimension régionale. Dans ce cadre, le rôle des Business Angels gagnerait également à être reconnu et renforcé.

Enfin, il est de la compétence des Etats de veiller à favoriser un climat des affaires sain et incitatif et de mettre en place un cadre réglementaire adapté aux enjeux, en constante évolution, du numérique (protection des données personnelles, sécurisation des transactions électroniques pour faciliter le développement du e-commerce, propriété intellectuelle, etc.)

Les pays du Maghreb sont dans la course pour faire du numérique un levier de leurs économies et de leurs processus de modernisation. Les logiques mises en place restent cependant fragmentées, voire concurrentes (par exemple la Tunisie et le Maroc se positionnent tous les deux comme plateformes d’accueil des activités d’offshoring). Davantage de coopération et de complémentarité permettrait à ces pays de partager leurs expériences, de profiter des économies d’échelle et de proposer une offre cohérente et plus attractive pour leurs champions nationaux mais aussi pour les investisseurs internationaux.

En effet, des champions nationaux d’envergure, tels que ceux identifiés dans ce rapport, qui développent des contenus et des activités dans la région, voire en Afrique, sont des acteurs qui peuvent apporter leur expertise pour faire du Maghreb un hub régional du numérique, porteur de croissance et d’emploi, et pour mettre en place une filière euromaghrébine des TIC.


Objectifs du rapport et recommandations


L’objet principal de ce rapport est d’identifier les éléments existants ou à créer permettant de monter une filière TIC euromaghrébine au sein d’un espace commun numérique et d’une société méditerranéenne de l'information et de la connaissance, pivot d'une véritable politique au service de la croissance économique des pays du Sud et du Nord de la Méditerranée.

Pour dresser cette problématique, la note est structurée en trois parties. La première partie est monographique. Elle est consacrée aux focus pays (Algérie, Maroc et Tunisie) et propose un panorama, non exhaustif, du secteur des technologies de l'information (équipement & infrastructure, zones technologiques, formation sur les TIC, e-gov, e-commerce, confiance numérique et protection des données personnelles). La deuxième partie présente des exemples d'entreprises maghrébines à fort potentiel de développement, au niveau régional et international. Ces champions nationaux sont un maillon fort dans le chantier de développement d’une stratégie de colocalisation entre le Maghreb et les pays de l’Europe ainsi que dans la mise en place de la filière. La troisième partie de l'étude propose des axes d'évolution pour faire du numérique l’un des leviers de l’essor des économies de la région. Ces pistes opérationnelles synthétisent le retour d’expérience des témoignages recueillis dans les trois pays auprès des professionnels, responsables publics et managers du secteur.

Les axes d’évolution identifiés sont les suivants :
-    Axe 1.    Un fonds de fonds euromaghrébin « MEDTIC »
-    Axe 2.    Un cadre fiscal et législatif adapté et qui tient compte du rôle des Business Angels
-    Axe 3.    Un fonds de soutien à l’innovation « Euro-Maghreb Innova »
-    Axe 4.    Un système d'échange universitaire euromaghrébin dans les filières de formation TIC et à vocation technologique
-    Axe 5.    Une plus grande mobilité des professionnels maghrébins du secteur
-    Axe 6.    L’alignement des niveaux de qualification et la reconnaissance des diplômes pour promouvoir la mobilité professionnelle
-    Axe 7.    Un cloud computing maghrébin souverain
-    Axe 8.    Un point d’échange internet IXP maghrébin
-    Axe 9.    La capitalisation sur les synergies euromaghrébines pour conquérir les marchés de l’Afrique et du Moyen-Orient
-    Axe 10. Le renforcement des mécanismes du soutien à l’export des PME euromaghrébines
-    Axe 11. Un réseau des clusters maghrébins des TIC en vue d’une concentration d’excellence
-    Axe 12. Un Observatoire maghrébin du numérique
-    Axe 13. La mutualisation des synergies des organismes représentatifs des professionnels des TIC dans la zone euromaghrébine
-    Axe 14. Un réseau maghrébin des parcs de recherche et des technopôles

Autant de recommandations qui confortent la conviction d’IPEMED. L’intégration régionale des deux rives de la Méditerranée devrait se faire à travers le système de production, en favorisant un partage de la chaîne de valeur, notamment, dans le domaine des technologies de l’information.



>> Consulter le sommaire et télécharger le rapport :

« Les technologies de l’information au Maroc, en Algérie et en Tunisie: Vers une filière euromaghrébine des TIC ? »

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