Comment rompre l'isolement des entreprises en Afrique et dans les PSEM[1]

Humeur n°204 -
Lundi 23 Octobre 2017 - Jean-Louis Guigou

Le monde de l’entreprise constitue le fer de lance de la transformation des sociétés en Afrique et dans les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée. Ce sont les « patrons » qui innovent, prennent des risques, créent des emplois et bousculent les administrations et les gouvernements qui trop souvent, trop longtemps habitués à l’économie de rente, continuent de protéger des avantages acquis.

La rupture entre le profit et la rente conduit à l’affrontement entre le monde de l’entreprise et la gouvernance politique.

Dans tous les pays riches en matières premières comme les pays arabes et africains (pétrole, gaz, cacao, forêts, etc.). La clé du développement se trouve dans l’issue du conflit entre le profit et la rente.

Dès lors se pose la question du soutien aux entreprises et aux jeunes entrepreneurs. Comment les encourager ? Comment les conforter et les soutenir dans le double combat contre la concurrence d’une part et contre les multiples freins des administrations et les obstacles du monde politique qui ont tous deux intérêt à voir se perpétuer l’économie de rente ? Comment rompre leur isolement et les sécuriser ?

L’expérience européenne et chinoise permet de suggérer trois solutions :

La première consiste à intégrer chaque entreprise dans une filière territorialisée. Cette intégration verticale assure aux entreprises (PME) une sécurité dans les relations vis-à-vis des fournisseurs et des clients et un accès aux technologies les plus performantes grâce à la R et D partagée.

La seconde méthode consiste à localiser les PME dans des districts industriels des clusters ou des zones économiques spécialisées et sécurisées (cf. Chine). Dans ces espaces, l’intégration horizontale leur permet d’avoir accès aux économies externes qui dans ces pays émergents sont géographiquement mal réparties (qualification des salaires, accès aux routes, chemin de fer, logistique, accès à l’électricité, à l’eau, proximité des administrations, des banques, etc.)

Si les entreprises restent isolées, localisées dans les banlieues, séparées les unes des autres, elles périclitent.

La troisième solution consiste à internationaliser au plus vite la production et recourir à la coproduction avec un partenaire étranger. Cette stratégie permet d’améliorer la gouvernance, de conquérir des parts de marché nationaux et internationaux, de partager la valeur ajoutée et d’accéder aux meilleurs technologies.

Ces trois solutions – intégration dans des filières territorialisées, localisation dans des clusters et internationalisation par la coproduction – constituent des filets de sécurité qui permettent aux PME de se développer et de créer des emplois dans la durée et l’inclusion. Ces trois méthodes permettent aussi de « sélectionner » les meilleures PME/PMI susceptibles de bénéficier de prêts bancaires.

Le moment est venu pour les PME, dans ces pays émergents mais aussi dans les pays de l’OCDE de rompre avec l’isolement et de passer à l’ère de la « co » : co-construction, co-working, co-gestion, coopération, co-bot, coopératives, etc. La montée en puissance du mouvement collaboratif renforce la nécessité des interconnexions de proximité dans la région Afrique – Méditerranée – Europe.

 

[1] Pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée

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