Impression suite à une mission en Egypte

Humeur n°161 -
Lundi 16 Mars 2015 - Jean-Louis Guigou

Du 13 au 16 février, nous avons effectué une mission en Egypte. Je dis « nous », car Elisabeth Guigou, mon épouse, ayant été lue Président de la Fondation Anna Lindh, dont le siège est à Alexandrie, devait se rendre au siège de la Fondation pour inaugurer une nouvelle année de travail et une nouvelle gouvernance.

De cette mission en Egypte, je retire les impressions suivantes :
1. La pression démographique galopante. La population égyptienne s’accroit de +2 millions/an. Cela conduit le pays à une course effrayante pour produire de l’alimentation, de l’eau, de l’énergie, etc. Mes interlocuteurs me faisaient remarquer qu’il n’y avait pas de famine, seulement de la pauvreté et des profonds écarts de richesse.
2. Le président Sissi donne la priorité au maintien de l’ordre, au retour des investisseurs étrangers (la conférence de Siham El Sheikh les 14 et 15 mars fut un succès avec 39 milliard d’investissements en perspective), mais aussi à la lutte, sans merci, contre les Frères Musulmans. Ceux-ci sont très largement implantés dans les secteurs sociaux, de la santé, du logement et de l’éducation ; autant de secteurs que l’Etat a du mal à faire fonctionner convenablement.
Mais les Frères Musulmans refusent de se normaliser et de légaliser leur existence. Ils ne sont ni un parti ni une association, n’ont pas de structure reconnue, pas de financement officiel et la légitimité des cadres n’est en aucun cas assurée par des élections. Amr El Shokabi (ancien député qui va se représenter et membre du COP) souhaite, par exemple, comme beaucoup d’autres, que le jeu politique interne aboutisse au fractionnement des Frères Musulmans en deux camps avec d’un côté ceux qui acceptent de rentrer dans le jeu démocratique (un parti, des financements, des recrutements, des statuts, etc) et ceux qui souhaitent rester dans la clandestinité.
3. Les entreprises françaises installées en Egypte sont très satisfaites de leurs résultats. Elles regrettent le départ de certaines qui a été compensé par l’arrivée d’entreprises britanniques ou européennes. Trois secteurs sont très porteurs : l’énergie, l’eau et l’agro-alimentaire. Or, dans ces trois secteurs les entreprises françaises sont performantes.
4. Le problème de l’eau « pourrait » engendrer des tensions politiques avec l’Ethiopie. En effet, l’Ethiopie construit sur le Nil bleu un des plus grands barrages du monde, qui sera inauguré en 2017 et risque de contribuer en partie à l’assèchement du barrage d’Assouan ? Une situation conflictuelle pourrait surgir.
5. Une note réjouissante : Enrico Macias s’est produit au Caire dans les jardins de la Résidence devant un millier d’Egyptiens francophones et d’expatriés. Avec ses vieux succès des années 1980/1990, Enrico Macias a su créer enthousiasme et émotion. Notamment quand, descendant de scène, s’approchant du public du premier rang des invités d’honneur, il a pris la main de Madame Sadate, veuve du président assassiné et à chanté la « mort du Berger » une chanson écrite justement pour déplorer l’assassinat du président Sadate. Ce fut un mouvement intense d’émotion.

 



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