La fragmentation du système international : la montée en puissance des sphères régionales

Humeur n°195 -
Jeudi 09 Février 2017 - Jean-Louis Guigou

Le dernier rapport de la CIA[i], sur l’état du monde en 2035 confirme les visions prospectives sur lesquelles l’IPEMED travaille depuis 10 ans : entre le niveau mondial inorganisé qui a entrainé la crise en 2008 et le repli national que Trump et les anglais préconisent, existe le niveau régional. L’Union Européenne, l’Alena, l’Asean et les multiples Accords Régionaux de Coopération (ARC) qui se multiplient depuis 2008 redonnent la priorité à la proximité géographique. « Le système international pourrait se fragmenter en plusieurs sphères régionales d’influence que les grandes puissances se disputeront. »

  • Les Etats-Unis : quoiqu’en dise Donald Trump vont continuer à exercer leur influence politique et économique sur l’Amérique du Sud par les échanges, le commerce , les flux financiers, le numérique, le tourisme, la formation des élites..
  • La Chine et la Russie, « avant que les contraintes économiques et démographiques ne ralentissent leurs progrès et que les pays occidentaux ne retrouvent leur puissance continueront de se considérer comme des leaders légitimes de « leurs régions » respectives, capables d’influencer l’économie et la politique des pays environnants » ; ainsi s’organisent les pays de l’Asean sous l’égide de la Chine.
  • L’Europe, n’a pas d’autre choix que de mettre cap au Sud pour retrouver des relais de croissance et de leur côté, les pays africains, s’ils veulent un développement durable inclusif et écologiquement efficace, n’ont pas d’autres choix que de se tourner vers Europe.

La course à la régionalisation est engagée, mettant face à face des pays au Nord (Amérique du Nord, Europe, Chine, et notamment la Russie) vieillissants et matures face à leur Sud (Amérique du Sud, Pays du Moyen-Orient, Afrique, Pays du Sud-est Asiatique) jeunes et en croissance. Voilà pourquoi le moment est venu d’assurer l’ancrage économique, politique, et intellectuel entre l’Europe et l’Afrique avec la Méditerranée comme pivot. « Le Quartier d’Orange », la région méridienne AME (Afrique-Méditerranée-Europe) est en gestation. Des tendances lourdes sont à soutenir et à renforcer pour accélérer cet ancrage :

- Le compactage des chaines de valeur, sur un nombre réduit de site localisés dans des espaces de niveau de développement différent, est rendu nécessaire pour le contrôle de la qualité, la réduction des coûts de transports et la volonté d’éviter de brusques variations des taux de change. L’éloignement est source de complication.

- La constitution de circuit-court favorisant l’économie collaborative et l’interaction entre l’économie et la société civile.

- La contestation de la globalisation tous azimuts et d’un monde mal régulé au profit d’une région où la mutualisation est possible.

- La constitution de la grande région Afrique-Méditerranée-Europe est la seule façon de retrouver des relais de croissance mais surtout de faire face aux grandes régions Nord/Sud qui se constituent en Amérique et en Asie.

La régionalisation Nord/Sud, et son impact sur les stratégies d’internationalisation des entreprises constitue la grande œuvre du XXIème siècle.

 

[i]  – Le nouveau rapport de la CIA et les régions – P.Beckouche, 24/02/2017.

 

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