Le retour de la proximité géographique

Humeur n°216 -
Vendredi 18 Janvier 2019 - Jean-Louis GUIGOU

La mondialisation des échanges commerciaux nous laissait croire qu’il n’y avait plus de distances géographiques, qu’il était possible de produire et d’échanger n’importe où, avec n’importe qui, à condition que le coût d’acquisition soit le plus faible possible.

Rien de tel en réalité. La distance constitue un obstacle à l’échange et la proximité un avantage.

Plusieurs causes redonnent à la proximité géographique des vertus bienfaitrices et recherchées tant sur plan économique que social ou environnemental.

1 – La régionalisation de l’économie est incontestable (1). A côté de la mondialisation tous azimuts se constituent des regroupements de nations proches les unes des autres : l’Union Européenne, l’ASEAN pour le bloc asiatique, l’ALENA pour l’Amérique du Nord, le MERCOSUR pour l’Amérique du Sud, la CEDEAO pour l’Afrique de l’Ouest, la CAE pour l’Afrique de l’Est. 

Les chaînes de valeur mondiales se régionalisent sur quelques milliers de kilomètres pour réduire les coûts de transport, contrôler la qualité des entrants, réduire les risques monétaires et exiger une certaine responsabilité sociale et environnementale tout au long du processus de transformation.

2 – Les circuits courts se développent, associant les producteurs et les consommateurs de produits agricoles, les producteurs d’énergies renouvelables et les utilisateurs, les épargnants locaux et les emprunteurs… Apparaissent des filières intégrées territorialisées.

3- La dialectique du mondial et du local joue à plein pour entraîner le retour des territoires appropriés par les citoyens. D’un côté, la mondialisation que personne ne maîtrise, génère la mobilité, l’homogénéisation, l’éphémère, l’éloignement, les espaces fonctionnels. D’autre part, le local suscite, en retour, la sédentarité, la singularité, les repères, les communautés, les territoires réappropriés. Entre le niveau mondial (incontrôlé) et le niveau local source d’identification symbolique forte (être breton, basque, corse…) les Etats Nations unitaires comme la France sont menacés. (2)

4 – Le retour des « biens communs » et l’économie collaborative. A côté des biens privés et des biens publics (la monnaie, la défense…), on assiste au retour des biens communs ou collectifs (la beauté des paysages, la paix rurale, la culture, …) qui sont souvent gérés à travers l’économie collaborative sur des espaces de petite dimension.

5 – Le développement de l’économie de la connaissance renforce la proximité géographique, culturelle… Nul doute que l’échange est renforcé quand les populations partagent les mêmes valeurs et les mêmes langues. Or l’économie de la connaissance progresse par le voisinage, l’échange, l’apprentissage, le partage, la solidarité…

Au total, la géographie est de retour. La mondialisation loin de tuer la distance, a favorisé le retour de la proximité géographique.

 

(1) HUGOT Jules et FOURQUIN Michel « La régionalisation moteur de la mondialisation » la lettre du CEPII n°365 – Mai 2016
(2) Kenichi OHMAE « The end of the Nation State” 1995

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