L’économie internationale se régionalise :
une nouvelle chance pour l'Afrique et la Méditerranée

Humeur n°236 -
Mardi 06 Octobre 2020 - Jean-Louis GUIGOU, Fondateur de l'IPEMED

 

L’économie internationale
se régionalise : une nouvelle chance pour l'Afrique et la Méditerranée

par Jean-Louis GUIGOU

 

Durant les années 1990-2008, l’économie internationale s’est mondialisée.

Depuis la crise de 2008, l’économie internationale « se régionalise » et avec la Covid 19, cette régionalisation va s’accélérer du fait des relocalisations.

La mondialisation ne bénéficie donc pas au repli national mais à la constitution de regroupement de pays, le plus souvent voisins, qui s’associent pour former une grande région.

 

L’Union européenne est le plus bel exemple de régionalisation de l’économie. Mais il y en a d’autres. Le nombre d’accords de coopération régionale (ACR) enregistré par l’OMC est passé de 5 en 1990 à plus 483 en 2020.

Les grandes régions internationales connues sont l’Union européenne, l’ASEAN + 3, l’AEUMC (ex Alena), le Mercosur, la Trilatérale et pour l’Afrique, le projet de Zone de Libre Echange Continentale Africaine.  (ZLECA)

Au-delà de la multiplicité de ces régions, trois grands ensembles se dessinent comme le prouvent les travaux du Professeur Pierre Beckouche pour IPEMED, confirmés par les études approfondies sur les chaînes de valeur menées par le CERPI, qui, de mondiales (CVM), deviennent régionales (CVR).

 

 

Dans ce monde de plus en plus dérégulé, tourmenté par les conflits commerciaux entre la Chine et les États-Unis, où la COVID-19 a montré la fragilité des chaînes de valeur hyper-fractionnées, les chefs d’entreprise changent de stratégie.

Ils privilégient le retour de la proximité géographique et culturelle, la valorisation des complémentarités démographiques, climatiques et enfin, la mutualisation des efforts face aux défis communs à surmonter.

Ainsi se constituent des régions de plus en plus intégrées, ayant parfois des niveaux de développement différent, mais qui partagent la même vision de l’avenir et le même souci de sécurité et de précaution.

La compétition internationale change de paradigme : à la concurrence par les coûts, quelles que soient les conséquences environnementales et sociales, se substitue la concurrence par les organisations, selon la belle formule de Pierre Weltz. Les facteurs de production ne sont plus donnés ; ils sont produits au sein des clusters, des technopoles, des zones économiques spécialisées, faisant appel à l’intelligence artificielle, à la robotisation, aux organisations 4D, à la digitalisation, au couplage entre manufacture et service, au couplage université-entreprise-formation, etc.

L’Europe a toutes ses chances d’accueillir certaines relocalisations et en profiter pour se réindustrialiser. Les pays d’Europe centrale et orientale tireront leur épingle du jeu. Cependant, leur population vieillit et leurs sources d’énergie industrielles se raréfient.

Parce qu’il manque à l’Europe et aux pays de l’Est des matières premières, de la jeunesse, certaines compétences, de l’espace, du soleil, des produits tropicaux, équatoriaux... il est temps de se tourner en priorité vers la rive sud de la Méditerranée et vers l’Afrique subsaharienne.

Ces pays ont une abondance de matières premières, de jeunesse, de multiples ressources.

Ils ont la volonté et la capacité de s’industrialiser à partir de leurs matières premières. L’Europe a donc tout intérêt à proposer un pacte industriel aux pays africains, avec coproduction et garantie de souveraineté à partager sur les process et les produits.

D’autant plus que la situation post-Covid redistribue les cartes de la délocalisation en défaveur de la Chine et offre une nouvelle chance aux pays au sud de la Méditerranée. 

Ne laissons pas les Chinois seuls participer à l’industrialisation de la Méditerranée et de l’Afrique.

 

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