Où en est l’Union pour la Méditerranée ?

Humeur n°107 -
Samedi 12 Janvier 2013 - Jean-Louis Guigou

Il est de bon ton en France de dénigrer ce que l’on a tant aimé dans le passé récent. L’UpM était liée à Nicolas Sarkozy. Celui-ci parti, le projet serait abandonné. Erreur ! Il suffit pour s’en convaincre de relire le discours du Président François Hollande le 28 août 2012 devant les Ambassadeurs de France pour constater le contraire. Il suffit aussi de constater l’activité de la diplomatie française sur la rive Sud, dont notamment la visite officielle de François Hollande en Algérie fin décembre. L’UpM vit et évolue. Il n’y a pas, par les temps qui courent, de grandes manifestations avec une médiatisation intempestive, mais de nombreuses actions et initiatives qui méritent d’être soulignées.

Voici au moins cinq raisons pour affirmer que l’UpM vit toujours, sans fanfare.

1)      Tout d’abord, l’héritage politique de l’UpM est considérable en termes de parité et de co-responsabilité. C’est un acquis considérable renforcé par les révolutions arabes. Plus rien ne peut être fait dans les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée (PSEM) si les européens ne respectent pas ce préalable politique : la parité.

2)      Ensuite, l’UpM a permis que s’organise avec force la société civile. Une vraie dynamique de projets « bottom-up » persiste et s’affirme, qui entrelace les acteurs des deux rives de la Méditerranée. Des réseaux socio-professionnels se constituent ; la coopération décentralisée s’enrichit ; la diaspora maghrébine se mobilise. François Hollande a affirmé que sa démarche s’insérait dans la « Méditerranée de projets ». Cette force surprenante s’est développée encore davantage avec les révolutions arabes.

3)      Par ailleurs, le Gouvernement français vient de créer une délégation interministérielle rattachée au Premier Ministre avec à sa tête un Délégué interministériel, l’Ambassadeur Serge Telle. Ce n’est pas rien que de reconnaître le caractère interministériel des interactions en Méditerranée où se mêlent les approches sectorielles (eau, énergie, santé, etc.), les démarches politiques, la coopération décentralisée, les activités scientifiques, culturelles et sociétales. Cette démarche française est d’autant plus intéressante que de nombreux pays en Europe et au Sud ont eux-aussi créé des cellules spécialisées dans les actions euro-méditerranéennes.

4)      Surtout, le Secrétariat général de Barcelone, avec à sa tête l’Ambassadeur Fathallah Sijilmassi, monte en puissance. Le bras armé de la politique européenne pour rassembler, instruire et décider de « projets » est maintenant opérationnel. Il y a un programme de travail considérable d’instruction vis-à-vis de la Commission mais aussi d’assistance technique vis-à-vis des acteurs de la société civile partenaires des projets.

5)      Enfin, au niveau de la Commission à Bruxelles, les choses évoluent bien, après avoir atteint un haut degré de confusion. La Haute Représentante aux relations extérieures, vice-présidente de la Commission, Mme Catherine Ashton, associée à Monsieur Méditerranée, M. Bernardino Leon, rend visite, écoute, débloque des aides multiples. La première réunion inter-institutionnelle de l’UpM a eu lieu en novembre dernier, sous co-présidence européenne et jordanienne, pour donner une forte impulsion aux projets de l’UpM et mobiliser les politiques. La Commission a par ailleurs débloqué 350 millions de dons avec le programme Spring. Le groupe de travail OCDE et Commission Européenne avec lequel a collaboré IPEMED a lancé le mécanisme ISMED (Investment Security in the Mediterranean) de sécurisation des investissements à long terme des projets. Les choses avancent.

En conclusion, sur le plan politique (parité), sur le plan institutionnel (le Secrétariat) et sur le plan de la dynamique de la société civile, l’UpM avance malgré les remises en cause des gouvernements du Sud. Ceci étant, un jour, il faut aller encore plus loin.

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