Entretien de Miguel Angel Moratinos à L’Orient-Le Jour - extraits

Humeur n° -
Jeudi 16 Avril 2015
De gauche à droite, Miguel Angel Moratinos, Fouad Zmokhol et Jean-Louis Guigou

L'ancien ministre espagnol des Affaires étrangères plaide à Beyrouth pour une refonte totale des schémas euro-méditerranéens passés. […]. Miguel Angel Moratinos […] était interrogé par L'Orient-Le Jour en marge d'un déjeuner-débat organisé dans un grand restaurant de Beyrouth par le Rassemblement des chefs d'entreprise libanais (RDCL) autour du thème « Une nouvelle politique euro-méditerranéenne de voisinage ; atouts et attente du Liban ». […]

Le diplomate espagnol était convié au déjeuner-débat en sa qualité de président du comité d'orientation politique de l'Ipemed (Institut de prospective économique du monde méditerranéen), un think tank euro-méditerranéen indépendant des pouvoirs politiques, créé en 2006. Fervent défenseur de la construction de la région méditerranéenne dans son ensemble, l'Ipemed se dit convaincu du rôle déterminant de l'économie dans ce domaine. L'une de ses fonctions principales est le brassage des élites méditerranéennes afin de les mettre en réseau, de leur permettre de travailler en confiance à des projets communs et de bâtir des politiques communes.

Dans son intervention, M. Moratinos a appelé à un « renouvellement » de la relation entre l'Europe et les pays méditerranéens, prenant en compte l'impératif majeur que représente la résurgence du défi sécuritaire et opérant une différenciation entre la question du voisinage de l'Europe au Sud et celle de l'Est. Pour cela, le diplomate a préconisé de « balayer le passé », autrement dit de repenser les schémas mis en place successivement, du processus de Barcelone (1995) à l'Union pour la Méditerranée (2007).

Dans cette nouvelle politique à redéfinir, le Liban occupe, selon lui, une place « centrale », notamment par sa position géostratégique et la dynamique économique qu'il est en mesure d'impulser dans le cadre d'opérations triangulaires Europe-Liban-Golfe, et qu'il est nécessaire de soutenir. Le délégué général de l'Ipemed, Jean-Louis Guigou, a souligné pour sa part le caractère « stratégique » du Liban aux yeux de cette institution. C'est, selon lui, un pays « dynamique et résilient en dépit de son environnement politico-économique difficile » ; il abrite des dirigeants d'entreprise « ouverts sur la Méditerranée et sur le monde » et des cadres « formés et rompus à la mobilité » ; et il dispose d'une diaspora mondiale et présente dans les espaces qui intéressent fortement l'Ipemed.

La question de « l'environnement difficile » du pays du Cèdre devait être abordée également par le président du RDCL, Fouad Zmokhol, quoique sur un mode plus ironique. « On ne peut pas dire que nous sommes gâtés d'avoir les voisins que nous avons, a-t-il lancé. Voilà pourquoi nous essayerons de nous tourner vers nos voisins méditerranéens un peu plus éloignés. »

Appelant à « plus de cohésion et de responsabilité partagées entre les pays de l'espace méditerranéen », M. Zmokhol a avancé, au nom des chefs d'entreprise libanais, une série de propositions concrètes, au premier rang desquelles figurent la mise en place d'une banque méditerranéenne d'investissement et la création d'un cadre institutionnel commun garantissant la liberté de circulation des biens, des capitaux, des services et des personnes au sein de cet espace.




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Entretien paru le 16 avril 2015
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