EUROPE, DE NOUVELLES CARTES POUR L’UPM

Humeur n° -
Mardi 22 Décembre 2009 - Pierre Beckouche. Conseiller scientifique d’IPEMED
La fin de l’année européenne de 2009 est un moment important pour la Méditerranée. Un tournant – mais dont on ne sait exactement quelles routes il ouvre. L’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre signifie la prise de fonction du premier président de l’Union et de la haute représentante pour les Affaires étrangères.

Reste à savoir quelle place ce couple anglo-belge accordera à la Méditerranée. Et comment cette prise de fonction se conjuguera avec la présidence espagnole – ancienne façon – de l’UE et donc de l’Union pour la Méditerranée. On voit mal l’Espagne, qui a fait de la Méditerranée un axe fort de sa politique étrangère, lâcher à la fois la présidence de l’UE et celle de l’UPM. La « cohabitation » qui se profile n’est pas une affaire purement formelle, car elle doit mettre en place le secrétariat général de l’UPM, cheville ouvrière du projet lancé le 13 juillet 2008.

L’AVIS CONTRAIGNANT DU PARLEMENT

Autre incertitude : comment le Parlement européen abordera-t-il le projet méditerranéen ? De nouveaux domaines tombent dans le champ de la procédure dite de « codécision » entre le Parlement et le Conseil de l’UE. L’avis du Parlement est contraignant dans des domaines cruciaux pour la Méditerranée : agriculture, fonds structurels, politiques énergétiques, migrations. Par surcroît, les députés européens décident désormais en dernier ressort de l’ensemble du budget de l’UE, y compris des « dépenses obligatoires » (45% du budget de l’UE) relatives à l’agriculture ou aux accords internationaux. Or en 2010 va s’ouvrir la négociation sur le prochain budget de l’UE (2013-2020), notamment sur la PAC. En jeu, la capacité des pays européens et des pays sud méditerranéens de concevoir une stratégie commune pour faire face à la concurrence grandissante des autres régions du monde, et au défi de la sécurité alimentaire.

LUI DONNER LA PLACE QU’ELLE MÉRITE

Enfin la nouvelle Commission annoncée le 29 novembre, donne a priori des cartes à la Méditerranée : c’est un Espagnol (Almunia) qui obtient le portefeuille de la Concurrence ; un Français (Barnier) le Marché intérieur – mais aussi les marchés financiers, ce qui va sans doute orienter une bonne partie de l’énergie du Commissaire vers le rapport de force franco-germano-britannique sur la question de la régulation financière ; l’Agriculture échoit à un Roumain (Ciolos, un fin connaisseur de l’agriculture méditerranéenne) ; une Grecque (Damanaki) est en charge des Affaires maritimes, un Italien (Tajani) de l’Entreprenariat. À quoi on peut rajouter les portefeuilles chypriote (Éducation et Culture), maltais (Santé), bulgare (Coopération internationale) et même allemand (Énergie – projet Desertec oblige !). Il y a évidemment loin de la coupe aux lèvres, et rien ne garantit que ces Méditerranéens donneront à la Méditerranée la place qu’elle mérite.

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