LA RÉGIONALISATION : UN ENJEU POUR L’AVENIR DE LA MÉDITERRANÉE

Humeur n° -
Lundi 26 Avril 2010 - Cécile Jolly et Macarena Nuño
Si la récession mondiale a remis au goût du jour les enjeux de régulation, les différences d’intérêt, de culture, de niveaux de développement ou de protection sociale rendent difficiles une entente mondiale. L’intérêt de la régionalisation apparaît, dans ce cadre, complémentaire des régulations mondiales : elle est aussi plus pertinente quant il s’agit de gérer des problèmes plus localisés (pollutions hors gaz à effet de serre, infrastructures) ou qui touchent davantage aux préférences collectives (normes qui sont un pré-requis des échanges de services).

L’intérêt pour la régionalisation est renforcé par l’autonomisation des zones de croissance autour des grands pôles économiques historiques (Amérique du Nord, Europe, Japon-Corée), mais aussi des grands émergents tels que la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil. Cette autonomisation est encore plus prégnante à l’issue de la crise, car les relances mises en place ont bénéficié prioritairement aux entreprises nationales et régionales remettant à l’ordre du jour la géographie des échanges que la mondialisation semblait avoir reléguée au second rang. La compétition pour sortir de la crise est devenue un enjeu géo-économique mondial et il convient d’admettre que le retour de la croissance en Europe gagnerait à s’inscrire dans le cadre d’une vision euro-méditerranéenne.

Un cadre régional rénové renforcerait la compétitivité et l’attractivité des marchés méditerranéens. C’est aussi une nécessité sociale. À l’heure où la croissance mondiale est de plus en plus fondée sur le facteur humain et la qualité de la main-d’oeuvre, la mondialisation a provoqué une mise en concurrence de ce capital humain au niveau mondial.

Cela a négativement pesé sur les travailleurs les moins qualifiés dans les pays riches tandis que la main-d’oeuvre qualifiée des pays émergents et en développement se délocalisait au Nord (même si le brain drain peut s’accompagner sous certaines conditions de brain gains). Or, la régionalisation favorise la circulation du capital humain tout en limitant sa migration vers les zones lointaines qui ont un niveau de vie différent.

Enfin, la préservation des ressources naturelles est un facteur indispensable à la croissance future. La limitation des dégradations environnementales doit se penser régionalement, dans la mesure où une partie des pollutions émises ou des prélèvements de ressources pâtissent à l’ensemble de la région. Les opportunités que suscite la croissance verte sont aussi régionales du fait des complémentarités évidentes entre les ressources renouvelables disponibles et les technologies déjà développées.

Quelle forme prendra une intégration régionale : un prolongement de l’Europe sans adhésion, une intégration économique en vol d’oie sauvage à l’asiatique, une forme hybride ni tout à fait européenne ni tout à fait méditerranéenne ? Les jeux sont ouverts tant du point de vie institutionnel qu’économique.
Partagez cet article
Imprimer Envoyer par mail