Le secteur agricole égyptien face au défi du changement climatique

Humeur n° -
Lundi 05 Septembre 2016 - Alfi Malek, Vice-président AEMDDE, Président de Déméter

L’extrême fragilité de l’Egypte quant aux conséquences du réchauffement climatique plaide pour un effort important et justifie la déclaration faite lors du discours inaugural à la COP21 à Paris, à savoir viser la limitation du maximum d’accroissement de température à 1,5°C en fin de siècle. Les conséquences du réchauffement climatique, telles que décrites dans le document officiel remis par les autorités égyptiennes à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC)*, sont considérables pour les secteurs essentiels de son économie, et pour l’agriculture en particulier.

Concernant ce secteur, la CPDN (i.e. INDC en anglais) de l’Egypte prévoie pour les deux principales cultures - le blé et le maïs – une baisse de la productivité de 15% et 19%, respectivement, d’ici 2050, en raison de vagues de chaleur successives du déficit en eau, etc.  De plus, il est précisé qu’entre 12% et 15% des terres arables les plus fertiles du delta du Nil seront affectées par l'élévation du niveau de la mer et l'intrusion d'eau salée.

Quelles solutions pour accompagner l’adaptation du secteur ?

Pour faire face aux besoins croissants de la population égyptienne, à savoir +50% en 2050, le gouvernement égyptien établit un objectif d’augmenter les terres agricoles prises sur le désert dont une première tranche d’un million et demi de feddans (1 feddan = 4200m²). Essentiellement irriguées par des eaux de forage, ces nouvelles cultures seront tributaires de l’énergie nécessaire au pompage. Hormis les sources d’eau provenant des canaux, les nappes d’eaux souterraines se situent à des profondeurs variables, souvent importantes et avec 500 m3/habitant/an, l’Egypte souffre déjà d’un déficit important en eau.   La prise en compte du nexus « énergie-eau-sécurité alimentaire-protection environnementale » sera donc déterminante pour la définition, la mise en œuvre et le succès des projets à venir.  

De plus, si l’agriculture occupe moins de 4% du territoire, elle représente 14,5% du PIB égyptien, environ 30% des emplois du pays et 15% des exportations (hors produits pétroliers)**. L’essentiel de la population égyptienne est composée de petits exploitants agricoles, produisant surtout une culture vivrière. Il convient de prendre en considération cette réalité pour proposer des solutions adaptées :

  • favoriser des méthodes d’irrigation efficaces énergétiquement et économes en eau ;
  • œuvrer au développement de la « permaculture » et de cycles courts de distribution ;
  • Réintroduire et développer les races locales telles que le poulet local, le buffle, etc. menacées de disparition face à la démarche agressive de certains monopoles, etc.

Au final, l’adaptation du secteur agricole égyptien doit passer par un changement de paradigme agricole et alimentaire.

Ce constat, qui s’inscrit dans la lignée des conclusions de l’Atelier organisé par l’IPEMED, RESOLIS et la Chaire Unesco en Alimentations du Monde / Montpellier SupAgro, appelle à  une coopération intensive avec les autres pays de la Méditerranée.

 

http://www4.unfccc.int/submissions/INDC/Published%20Documents/Egypt/1/Egyptian%20INDC.pdf

** http://www.tresor.economie.gouv.fr/13415_lancement-du-projet-de-bonification-d15-m-de-feddans

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