Transitions arabes: comment les accompagner?

Humeur n° -
Mardi 13 Décembre 2011 - Agnès Levallois
Les pays européens vont-ils être capables d’accompagner les transitions démocratiques à l’œuvre ou bien le modèle turc va-t-il s’imposer aux pays du Sud ?

Les bouleversements à l’œuvre dans les pays sud de la Méditerranée ouvrent la voie à des périodes de transition sans que l’on sache encore ce vers quoi elles vont déboucher. Elles seront probablement longues même si tout va plus vite aujourd’hui et l’impatience du changement est à la hauteur des frustrations accumulées pendant les décennies de dictature. À l’heure de l’extraordinaire rapidité de diffusion de l’information le risque est grand de vouloir faire coïncider le temps médiatique au temps politique.

Le principal défi que doivent relever les nouveaux acteurs est celui de la revendication politique et sociale exprimée par les manifestants. Les observateurs s’interrogent sur le programme économique de ces partis se réclamant de l’islam politique, premières forces politiques issues des urnes aussi bien en Tunisie, au Maroc et demain en Égypte. Ceux-ci ne manquent pas de rassurer les investisseurs étrangers conscients de la nécessité de remettre l’économie en marche au risque d’être très vite contestés par leurs électeurs. Hamadi Jebali, secrétaire général d’Ennahda, a pris soin de dire lors de l’inauguration d’un congrès sur les voyages à Monastir qu’«En?nahda n’est pas un parti religieux mais un parti civil politique ». Dans le même temps, la Banque centrale de Tunisie a tiré la sonnette d’alarme en raison, selon elle, du manque de visibilité des investisseurs locaux et étrangers sur la politique économique et appelle à une accélération du processus de formation du gouvernement afin de regagner la confiance des investisseurs.

CARENCES

 Les partis islamistes ont ga?gné car ils défendent les plus défavorisés, palliant ainsi les carences des États. Ils ne sont pas usés par le pouvoir, car ils ne l’ont jamais exercé, et revendiquent une plus grande autonomie en politique régionale et internationale vis-à-vis des États-Unis et des Européens. C’est en cela que le modèle turc les inspire: forte croissance économique associée à une capacité à parler d’égal à égal avec Washington ou Bruxelles. Pour autant, l’expérience turque va-t-elle s’imposer dans les pays de la rive sud de la Méditerranée? Ankara le souhaite probablement. À charge pour les  pays européens de relever le défi qui leur est lancé d’accompagner les transitions en trouvant l’équilibre entre non-indifférence et non-ingérence et en s’ouvrant afin de favoriser de vrais échanges et non en se repliant frileusement sur sa rive nord.
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