UNE OPPORTUNITÉ DÉMOGRAPHIQUE POUR LE SUD

Humeur n° -
Mardi 15 Septembre 2009 - Akram Belkaid, journaliste et conseiller d’IPEMED
Certaines représentations réductrices ont la vie dure. C’est le cas de celle qui montre la rive sud de la Méditerranée comme une région où une démographie galopante serait à l’origine de tous les maux, qu’ils soient économiques, politiques et bien sûr sociaux.

Pourtant, depuis plusieurs années, des travaux ont démontré, chiffres à l’appui, que la situation a changé. Dans leur grande majorité, les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée sont entrés en transition démographique comme en témoigne l’impressionnante diminution de leur taux de fécondité et leur convergence rapide vers la situation qui prévaut en Europe. Le phénomène est tel, que les démographes s’inquiètent déjà de la manière dont cette mutation va être gérée par les pays concernés notamment en matière de retraites.

UN DÉFI MAJEUR

Dans une récente étude, le démographe Gilles Pison met ainsi en exergue ce défi, notant que le « vieillissement démographique touche toute la planète » mais qu’il devrait s’effectuer de manière bien plus accélérée dans le Sud en comparaison de qui s’est passé en Europe, aux États-Unis et au Japon(1). Le constat est simple : au Nord, le papy-boom s’est déroulé sur près d’un siècle ; il lui faudra moins du quart pour survenir en Tunisie et Algérie ou encore en Syrie. Cela signifie que les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée ont intérêt à se préparer à ce vieillissement qui, en termes concrets, signifie que la proportion des seniors augmente quand celle des juniors diminue. Ils doivent appréhender l’incontournable défi du financement des retraites mais aussi des soins de santé dans un laps de temps très court et cela d’autant que les traditionnelles solidarités familiales sont de moins en moins fortes.

UNE SITUATION EXCEPTIONNELLE

Pour l’heure, la situation est plutôt avantageuse. « Dans la plupart des pays du Sud, la chute de la fécondité a fortement réduit la part des jeunes sans que la part des personnes âgées n’ait pour l’instant augmenté », rappelle Gilles Pison. Ce dernier estime qu’il s’agit là d’une « opportunité démographique que les pays du Sud doivent saisir pour se développer tout en se préparant à une population plus âgée dans le futur ». C’est ce qu’affirment les démographes Philippe Fargues etHervé Le Bras dans une Note d’Ipemed. Pour eux, c’est une « situation exceptionnelle qui ne durera qu’une génération, où les jeunes de 20-30 ans sont dégagés des charges qui pesaient sur les générations précédentes, tout en n’ayant pas à assumer celles qui attendent la génération suivante »(2). Et de conclure que la démographie donne à ces jeunes « une liberté de mouvement exceptionnelle ». En clair, ils peuvent-être tentés de migrer mais ils peuvent aussi représenter un indéniable atout démographique en contribuant aux progrès de leur pays pour peu que leur soit offerte la possibilité de le faire.

(1) « Le vieillissement démographique sera plus rapide au Sud qu’au Nord », Population & Sociétés n°457, Ined, Juin 2009.
(2) « Migrants et migrations

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